[Compte-rendu] J’ai testé pour vous : Layers of Fear
Nous entrons dans le mois d’octobre et débute avec lui les festivités d’Halloween (ce que nos ami.es anglo-saxon.nes appellent le Spooktober*).
D’aucuns diraient que nul besoin est de convoquer Halloween pour vivre un quotidien horrifique lorsque l’on est doctorant.es, pourtant certain.es d’entre nous arrivons encore à nous réjouir à la perspective d’une montagne de bonbons devant des films d’horreur … ou en jouant à des jeux !
Vous me voyez venir avec mes gros sabots, j’ai saisi cette occasion pour nier les impératifs de la réalité et me plonger un peu plus dans l’ambiance automnale avec Layers of Fear. J’ai testé le jeu et voici mon compte-rendu !
Layers of Fear est un jeu vidéo d’horreur psychologique développé et édité par le studio polonais Bloober Team en 2016. Le jeu relate l’histoire d’un peintre devenu fou en tentant de créer l’œuvre parfaite : un avant-goût de ce qui nous attend pendant la rédaction ? (Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d’une pure coïncidence).
À la suite de ce jeu, est sorti le DLC** Layers of Fear: Inheritance qui s’inscrit dans le prolongement direct du premier. L’histoire suit la fille du peintre et se concentre sur son retour dans son ancienne maison. En 2023, le jeu a été réédité et réimaginé pour relier tous les évènements des deux jeux ainsi que les extensions. C’est de cette version dont il sera question ici !
Début du jeu
Vous incarnez une écrivaine qui gagne un concours pour aller écrire une histoire d’horreur dans un phare lugubre, isolé de tout. À peine arrivée sur place, elle reçoit un appel des organisateurs qui la pressent à commencer la rédaction (🚩🚩). Elle raccroche agacée et tente de se mettre au travail, mais le lieu ne l’inspire pas du tout, au contraire elle angoisse et commence à être paranoïaque. Elle est alors contactée par une antagoniste inquiétante, qui fait le lien entre toutes les histoires : la reine des rats.
Quand l’autrice commence la rédaction, nous plongeons avec elle dans l’histoire située dans les années 1920 en Angleterre (ndlr. Histoire qui est celle du jeu original). Le nouveau protagoniste que vous incarnez, dont on ne connaît pas le nom, rentre chez lui après une audience. Après avoir brièvement exploré sa maison vide, il se rend dans son atelier pour commencer à travailler à son chef-d’œuvre. Après avoir ajouté la première couche, il commence à avoir des hallucinations au sujet de ses rencontres passées. Alors qu’il déambule dans un manoir victorien, nous découvrons de troublants secrets.
Caractéristiques
C’est un jeu psychologique, et pour mener à bien ce jeu, il vous faudra essentiellement résoudre des casse-têtes tout en menant des phases d’explorations dans le manoir (et accessoirement ne pas lâcher votre manette en hurlant à chaque bruit, ce qui ne fut pas mon cas. Bien évidemment).
Les œuvres ont une place d’honneur dans ce jeu et participent à l’élaboration d’une ambiance suffocante. Loin d’être un simple recours esthétique, les œuvres contribuent entièrement à la narration et au jeu : à vous de scruter les œuvres, d’identifier leur emplacement dans le manoir afin de vous repérer et parfois de faire jouer votre mémoire. L’une des pièces principales du jeu est d’ailleurs l’atelier du peintre, où vous devrez vous atteler à la réalisation de votre prochaine toile : toiles, cadres, palettes, pinceaux et peintures se démultiplient à l’infini et vous plongent dans l’angoisse de la création !
Avis
Quand j’ai découvert l’existence d’un jeu d’horreur sur la vie d’une historienne de l’art d’un peintre et qui réutilisait les grands chefs-d’œuvre de la peinture occidentale, j’ai tout de suite su qu’il me fallait l’essayer.
Bien mal m’en a pris, puisqu’entre temps, mon amour de l’art m’avait fait oublier ma très faible tolérance à la peur. Pourtant tous les signes étaient là pour m’avertir : un jeu à la première personne, dans une maison sombre et glauquissime, une histoire dérangeante, des apparitions encore plus glauques, et des jump scares*** qui se multiplient au fil des niveaux. Une promenade de santé, donc.
On pourrait dire (à juste titre) que je m’effraie d’un rien, mais avouons tout de même le travail impressionnant de Sound Design**** effectué afin d’immerger complètement les joueuses et les joueurs dans l’angoisse la plus totale. L’ambiance est assez anxiogène et amplifiée par le son binaural qui plonge dans la narration. En effet, Layers of Fear est un jeu axé sur le rendu angoissant de l’atmosphère d’un film d’horreur : ici pas de gestion d’inventaire ou de menu dans lequel on peut se réfugier le temps de reprendre haleine, et rares sont les endroits de la maison où vous vous sentirez en sécurité. Une vraie expérience immersive !
Outre ces mécanismes putassiers pour effrayer la pauvre joueuse que je suis, je me dois de saluer une histoire bien menée qui sait ménager ses effets de surprises. Le graphisme est beau, les différentes textures réussies et les œuvres reproduites avec soin ! La version combinée de 2023 offre avec les deux parties du jeu et les extensions (comprenant l’histoire de l’autrice, du peintre, de la musicienne, de la fille et de l’interprète) un univers complet explorant différents scénarios ayant tous un même point commun. Tous les drames ou actes violents ne sont jamais montrés totalement et sont vécus au travers des discussions entre les personnages, laissant ainsi souvent la place à l’interprétation.
Les cinq histoires possèdent des fins différentes, déterminées par des choix en apparences anodines, mais qui définissent le destin des personnages. Il est possible d’explorer les autres possibilités grâce à la sélection des chapitres qui permet de rejouer toutes les histoires (à l’exception de l’histoire de l’autrice qui est l’histoire principale de la version de 2023) et de conserver la progression.
À vous de choisir laquelle de la version originale avec l’histoire du peintre (2016), ou de la version complète du jeu (2023) vous tentera le plus, dans tous les cas Layers of Fear vaut vraiment le détour ! Il sera une parfaite activité pour procrastiner et vous plonger dans l’ambiance d’Halloween, tout en ayant l’impression de travailler ! Entre deux crises de hurlement, vous pourrez vous amusez à repérer les nombreuses œuvres qui se cachent dans le jeu. Attention cependant, vous ne les verrez plus tout à fait comme avant (pensée émue pour la Dame à l’hermine de Léonard et l’Autoportrait de Joshua Reynolds).
Bon jeu !
Natacha Aprile
Doctorante
Disponible sur : Nintendo Switch, Xbox One, Playstation 4, Steam, Linux, Microsoft, MacOS
* Spooktober : mot d’argot anglosaxon pour désigner le mois d’octobre et les festivités pour Halloween, qui lui sont associées. Le terme est une fusion des termes anglais Spook (« fantôme », ou par extension « effrayant ») et October (Octobre).
** DLC : contenu téléchargeable qui vient en complément du jeu initial.
*** Jump scare : littéralement « saut de peur », le jump scare est l’apparition soudaine d’une image ou d’un personnage, souvent accompagné d’un effet sonore, dans le but de choquer et d’effrayer les spectatrices et les spectateurs. C’est un procédé courant dans les films et les jeux d’horreurs.
**** Sound Design : est une technique consistant à utiliser des éléments sonores pour créer une bande sonore cohérente avec l’histoire racontée afin de favoriser l’immersion.
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Natacha Aprile (10 octobre 2024). [Compte-rendu] J’ai testé pour vous : Layers of Fear . Carnet des doctorant.es du Centre André-Chastel. Consulté le 14 novembre 2024 à l’adresse https://chasteldoc.hypotheses.org/8034